L'alcool circule dans ses veines. Un doux poison qui inhibe toutes
pensées et tout sentiment en elle. Elle marche, un sourire sur les
lèvres. La musique hurle dans ses oreilles. Elle esquisse quelques
mouvements de danse sans se préoccuper des regards des autres. L'alcool
lui donne ce pouvoir. La nuit est noir, les trottoirs sont à peine
illuminés par la lumière orange des lampadaires. Il est tard, il n'y a
pratiquement personne dans les rues. Subitement, une envie sauvage
s'empare d'elle. Une urgence. Elle quitte le trottoir pour aller marcher
en plein milieu de la rue. Il n'y a pas de voiture, pas encore mais
elle veut confirmer quelque chose. Alors au loin, les lumières blanches
des fards d'une voiture l'éblouie. Son coeur se met à palpiter.
L'adrénaline déferle dans ses veines et fait exploser son corps d'une
douce euphorie. Le danger. La mort. Elle les sent en elle, comme un ver
qui la rongerait. Elle aime le sentiment. Elle n'a pas peur. L'alcool
l'empêche de comprendre totalement ce qui pourrait lui arriver si elle
ne bouge pas suffisamment vite.
Elle observe la voiture foncer droit sur elle. C'est la mort qui va lui
rentrer dedans. Un coup de poing en pleine figure. L'anéantissement
d'une existence sans éclat. Elle se surprend à se demander si elle a
envie de se pousser. Elle hésite. Elle se tien en équilibre sur la ligne
jaune au milieu de la rue. L'adrénaline bourdonne à ses oreilles. Un
choix qui peut sembler si simple, mais qui ne l'est pas finalement.
Puis, à la dernière seconde, elle s'écarte de la trajectoire du bolide.
Un coup de klaxon retentit quand la voiture passe près d'elle et la
frôle. Sa robe se soulève sous la le vent et la poussière que l'auto
laisse derrière elle. La jeune fille éclate de rire. L'espace d'une
seconde éphémère, elle s'est sentie en vie. Un sentiment puissant et
grisant qu'elle voudrait le ressentir à nouveau, là tout suite.
Elle court dans les rues déserte, laisse la musique la guider. La vie ce
soir semble lui appartenir. Même si il y a deux minutes, elle a sentit
la caresse de la mort sur sa joue, sur ses lèvres, elle n'y a pas
succombé. Elle a choisi. Et les couleurs de sont choix se réverbèrent
sur l'asphalte et les lampadaires illuminant le ciel de scintillement
aux reflets dorés.
Tout à coup, derrière elle des pas se font entendre. Ils se calque à son
rythme. Elle est suivi. De nouveau, la proximité du danger lui donne
des ailes. Elle court plus vite. C'est un jeu. Le jeu de la vie. Pour
ressentir, elle doit agir. Elle le comprend en courant. Plus elle bouge,
plus elle inhale de l'espoir et de l'assurance. Elle sait ce qu'elle
veut. Elle refuse de laisser une seconde de plus de sa vie à l'inertie
qui l'enveloppait depuis quelques temps. Elle réalise qu'elle a trop
pleurée, qu'elle à laissé faire pendant trop longtemps et qu'elle a
perdu le goût de se battre. Marionnette d'un destin fade, elle se
complaisait dans son malheur. Elle refuse de s'agenouiller une fois de
plus sous le poids du monde. Elle refuse d'abdiquer. Chaque seconde, où
elle inspire l'air frais de la nuit, elle reprend des forces. Plus elle
expire sa souffrance, son désarrois et sa solitude, plus elle gagne du
terrain. Les pas menaçant s'efface peu à peu.
Elle arrive finalement, essoufflée, au pied de l'église au coin de sa
rue. Les marches sont illuminés par la lumière du clocher. Elle
s'assoie sur les plus hautes marches, son coeur cognant contre sa cage
thoracique. Elle a le souffle court. Ses long cheveux blond sont en
bataille. Sa robe blanche lui colle à la peau. Elle regarde la rue qui
s'ouvre devant elle. Elle est seule. Il n'y a personne. La mort a
échouée. Et même si les cicatrices ne se sont pas effacées, même si,
maintenant que l'adrénaline quitte ses veines ainsi que l'alcool, elle
ressent un peu de détresse, elle ne franchira plus jamais cette mince
ligne qui traverse le néant. Elle bâtira des oasis dans le désert de sa
vie. Elle élèvera des murs de soies et de fleurs. Mais plus jamais des
barrières infranchissables.
Elle est jeune. Elle utilisera cette force pour semer des fleurs de vies
autour d'elle. Elle échouera certainement encore quelques fois, et
probablement qu'elle pleurera parfois la nuit le vide d'un amour qu'elle
chérira toute sa vie. Mais elle ne succombera plus aux murmures des
anges noires autours d'elle. Elle ouvrira ses bras au ciel, au soleil et
à la lumière du monde. Elle sublimera la noirceur en elle, l'exposera
et l'empêchera à jamais de la contrôler. Elle créera des oiseaux aux
ribambelles de couleurs magique qui scintilleront quand elle se sentira
perdue.
Elle lève les yeux vers les étoiles qui tapissent le firmament. Elle
esquisse un sourire soulagé. La lune lui rend son sourire. Ce soir, une
jeune fille a tenu la main de la mort, à marcher vers l'éternité de
souffrance qu'elle se croyait vouée à vivre et à choisi les rêves et la
lumière. Ce soir, la glorification de la vie a pris tout son sens.
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