jeudi 20 novembre 2014

www.love

Thème : www.love

Je serai brève. Tu ne seras pas surpris, toi qui aimes les conversations à sens-unique et le son de ta voix. Je te quitte pour un autre. Un homme déjà, grand, fort, beau et oh, Dieu, bon au lit. Ne te vexe pas, je te prie, il était clair que toi et moi, c'était déjà l'essoufflement du dernier chapitre d'un livre sans éclat. Il est temps qu'on mettre les 3 petites lettres finales à ce qu'on peut appeler, mais je ne l'écris pas avec enthousiasme, fais-moi confiance, notre relation.

J'ai mis tes effets, si on peut appeler effets, ton peigne et ta brosse à dents, dans une boîte en carton avec le sceau de la poste. J'y ai aussi rajouté mon rasoir, tu semblais croire qu'il t'appartenait alors j'ai fait preuve de magnanimité et te l'ai envoyé aussi. Tu remarqueras que j'ai démontré beaucoup d'indulgence dans tout le processus qu'a été notre rupture. J'espère, je souhaite plutôt, que tu l'apprécieras et sauras m'en remercier. Surtout, évite de m'appeler. Déjà que nos conversations étaient un ramassis de cliché et de futilité couronné d'onomatopée, en grande partie venant de toi, je préfère que nos « rapports » si je puis dire, soit strictement inexistant. De plus, il serait gênant que ce soit Albert qui te répondre.

Comme j'ai pitié pour toi et que je désire que la transition entre moi et ta vie fade te soit le plus agréable possible, je t'ai inscrit sur un site internet. Ne me remercie pas, c'était la moindre des choses. Voici le lien et adieu. 

WWW.LOVE

lundi 17 novembre 2014

À bout de souffle

Thème : À bout de souffle

C'était un désordre plus grand que ce que son cœur pouvait le supporter. Elle ne savait plus comment faire. Elle aurait aimé qu'on lui prenne la main et qu'on la guide à travers ce bois semé de ronce. La noirceur tapie dans son esprit était telle, qu'elle ne pouvait plus apercevoir les roses qui pourtant, parsemaient ses pas juvéniles. C'était l'hiver au fond de ses yeux mordoré.

Planté au beau milieu de la pièce, elle regarde autour d’elle, prise de vertiges. Les murs tapissés de papier peint aux couleurs très douce, lui fait horreur. Elle a envie de tout arracher, à main nue s’il le faut. Elle s’avance d’un pas hésitant, ne sachant plus si elle aura la force. Des images se bousculent à la frontière de son cœur en miette. Des souvenirs amers d’un bonheur qui résonnait il n’y a pas si longtemps entre les fondations de la maison.

Ses yeux rougis d’avoir trop pleuré, se posèrent sur le bureau dans le coin de la pièce. Un bureau simple, blanc, décoré pour qu’elle ait envie d’y aller. Un Macbook Air trône fièrement, comme l’aurait fait une reine parmi ses sujets. C’est un cadeau de son père, pour l’aider dans ses études. Si la beauté peut te motiver à ne pas abandonner tes études, alors le prix n’a aucune importance a-t-il dit en riant.

Elle s'avance, rageuse, de la hargne au fond de ses iris bruns et sans réfléchir,- parce qu'à quoi ça sert finalement ?- Elle balance l'ordinateur en travers de la pièce. Celui-ci, aussi léger que son nom le laisse présager, va se briser sur le mur, laissant derrière lui, une traîné de débris. Ses sens s'embrasent alors en une haine destructrice et féroce qui allume en elle un profond mépris pour tout ce qui l'entoure. Elle a été bernée.

C’était hier.

On lui a dit que tout irait bien, qu'elle saurait gérer, qu'on l'aiderait, que jamais, ils ne la laisseraient seule avec l'immense fardeau qui était maintenant le sien. Elle les a crûs et voilà où cela l'avait mené ; dans une immense chambre, peinte en rose doux. Au début, elle avait senti leurs supports, leurs affections et leurs envies de lui donner toute la liberté qu'elle avait besoin. Puis, les restrictions étaient venues assombrir les jolies paroles. Que des fioritures pour camoufler les ordres et les exigences. Elle n'était pas libre, elle devait bosser tout de même, avoir la moyenne, sourire, ne pas être désagréable et surtout, ne pas lui crier après. Tu l'as cherché qu'on lui chuchotait, paye-en le prix. Quand on s'amuse sans prendre les précautions, on accepte.

Et aujourd'hui, à l'aube de ses seize ans, elle reste pétrifier au milieu de la chambre, le souffle court. Le glas a sonné dans une lointaine contrée, celle qu'elle ne verra jamais, prisonnière d'un choix qui n'était pas le sien. Elle regarde le lit pour bébé en bois, la jolie literie avec des petits chats et son cœur se durcit. Elle ne ressent pas l'attendrissement, ni la joie. Elle a seulement peur et plus encore, tapis loin au fond de ses tripes, elle a la rancœur, un poison qui fait scintiller ses yeux d'un noir profond.

Elle s’avance vers le miroir sans regarder son énorme ventre, sans porter attention au liquide poisseux qui coule le long de sa cuisse, faisant abstraction de la douleur qui lui vrille les entrailles. Elle le fracasse avec son poing, efface l’image d’elle et celle de son destin déjà tout tracé par leur limite imposée. Elle prend le verre entre ses doigts potelés, là où aucune bague de fiançailles ne se retrouve. Un mensonge de plus. Sa lèvre inférieure tremble, son regard chavire, sa vie devient incertaine, lointaine, difficile à cerner. Elle ne sait plus ce qui doit être. Elle voudrait être une adolescente qui va à l'école, qui sèchent parfois le cours de chimie, qui a des amis et qui va à des soirées. Elle voudrait ne pas avoir se fardeau qui ne lui a pas demandé la permission, ce qu'elle, elle en pensait. Elle voudrait retrouver son bien le plus précieux, ce qu'elle a perdu le jour où les deux barres rouges sont apparues sur le test de grossesse : Son innocence.

Elle s’effondre alors au sol, secoué de sanglot, à bout de souffle.

mardi 11 novembre 2014

On l'a repêché ce matin

 Texte écrit sous le thème : On l'a repêché ce matin. 

Hier, je jouais avec ma sœur cadette. Elle m’énerve, souvent, mais en réalité, je l’aime de tout mon cœur. Elle me comprend et parfois, le soir, je me glisse dans sont lit, quand papa et maman sont redescendu au salon et nous parlons jusqu’à ce que nous nous endormions. Je lui raconte comment est l’école. Je suis en quatrième année. J’ai pleins d’amis et on m’a même élue présidente de ma classe. J’adore ça, parler devant les autres élèves. En plus, j’ai toujours un tas d’idées géniales. Ce n’est pas moi qui le dit, enfin bon peut-être un peu oui, mais c’est mon prof qui ne cesse de venter mes mérites à qui veut bien l’entendre. Mes parents sont fiers, je le sais parce que chaque fois que Lucas (mon prof de quatrième année) leur parle de moi, ils redressent les épaules et relèvent la tête. Je distingue même une lumière doré autour d’eux. C’est comme si des milliers de soleils les enveloppaient. C’est beau.

Je sais que je suis encore jeune, mais je ne pense pas comme toutes les autres fillettes de mon âge. J'ai de l'ambition. Cela ne veut pas dire que je ne m'amuse pas, à ça non. J'adore jouer avec ma sœur, elle aime rire et elle se plie toujours de bons cœurs à mes quatre volontés. Elle est sans malice et fort jolie. Elle brisera des cœurs plus tard. Mais parfois, j'aime rester seule à regarder le ciel et à penser à demain. J'ai hâte d'être grande et d'avoir la possibilité d'exécuter tout ce qui se bouscule dans ma tête. J'ai tant de rêves, tant d'amour en moi, que parfois, j'ai l'impression que je ne pourrai contenir cette énergie.

Hier, j'ai fait un câlin à ma sœur, elle pleurait, car elle devait aller à la garderie. Je lui ai dit qu'elle se ferait pleins d'amis et qu'elle ne verrait même pas le temps passer. Puis, je lui ai promis d'aller la chercher après l'école. Comme je suis plus vieille que mon âge, mes parents me donnent des responsabilités. J'adore ça. J'ai joué un peu avec elle avant qu'elle parte pour lui faire oublier son cafard. J'ai séché ses larmes et j'ai ajouté des étoiles dans ses yeux puis je lui fais un au revoir de la main.

Le soir même, j'étais tout excitée d'aller retrouver ma sœur. J'avais hâte de savoir comment sa journée s'était déroulée, si elle s'était fait des amis et si elle s'était, un peu, ennuyée de moi. Mon prof, constatant mon agitation, m'a proposé de m'amener jusqu'à la garderie, puisque c'était quand même dix minutes de marche. J'ai accepté parce que, pour tout vous dire, je le trouve beau mon prof. Il a des cheveux d'un brun doux et des yeux bleus vifs. Il est très intelligent et surtout, il a une voix grave qui donne chaud. Il est agréable à écouter, ce qui est bien, vu qu'il enseigne.

Nous avons roulé pendant longtemps avant que je me rendre compte que nous n'allions pas à la garderie. Le décor avait changé, c'était désert. Les arbres squelettiques projetaient les ombres des derniers rayons de soleil. J'ai dégluti et serrer les poings. Mon cœur s'est mis à battre la chamade contre ma poitrine et de fine perle de sueur ont glissé sur ma nuque. Il s'est retourné vers moi, ses yeux étaient à présent aussi noirs que son aura. La peur, s'est insinuée dans tous les pores de ma peau. Il a avancé la main vers moi, a caressé ma joue doucement, mais je l'ai senti comme une brûlure. Il a pris une mèche de mes longs cheveux cendrés et les a respirés. Je suis resté pétrifié sur place, incapable de dire ou faire quoique ce soit. Il a souri.

-Ne crains rien Aude, tu es trop parfaite pour qu'on t'abîme. Jamais je n'oserais te faire du mal.

Mais pas moi, pensais-je et je lui ai sauté dessus.


***

On l'a pêchée ce matin.

C'était une matinée de fin d'octobre, la brume enveloppait les arbres de ses longs bras évanescents. Les oiseaux étaient muets, le ciel était bas, lourd, chargé de flocons, la nature ne respirait plus. Ils sont sur la berge, le regard sombre, le cœur alourdit de tristesse. Personne ne parle, pas même un chuchotement. Sur la rive, recouvert d'un drap blanc, tel un linceul, gît un corps nu. D'en dessous du drap, on peut apercevoir quelques mèches cendrées.

lundi 10 novembre 2014

C'était en juillet

 Texte écrit sous un thème : C'était en juillet


Prendre une grande inspiration, la retenir, ne pas penser, fermer les yeux, se lancer, appuyer sur le poussoir.

Attendre.

Adosser au pied de mon lit, je rejette la tête en arrière au moment où je sens le poison remonter le long de ma veine, caresser l'aorte de mon cœur et finir sa course dans ma tête. Une explosion de lumière se frappe à mes paupières closent. Elles frétillent. Mes membres s'agitent sans ma volonté. Ils sont vivants. Une sorte de râle s'échappe de mes lèvres. Mon cœur bat à tout rompre, comme s'il voulait se frayer un chemin hors de ma cage thoracique. J'ai envie de prendre un couteau et de l'en sortir de mes propres mains.

Contempler la vie.

Des heures s'écoulent dans le sablier de mon temps infini. Mon temps, suspendu, une décision qui m'appartient. La seule qui soit valable. Un sourire se dessine sur mon visage, je le sens, comme je peux sentir l'euphorie me gagner. Cette sensation d'exister, de communier avec l'invisible ambiant. À nouveau, je danse.

Libre de mes chaînes.

J'entends la musique, elle susurre à mon oreille des rêves pailletés d'or. Elle me rappelle ce qu'était ma vie avant. Lentement, le poison couleur de mes rêves d'autrefois, s'enflamme dans mon corps, glisse lentement sur mes joues, broient mon cœur, mes songes, mes aspirations.

Une seconde pour toute une vie.

J'ouvre lentement les yeux, efface d'un hurlement les étoiles qui brillaient jadis dans mon ciel. C'était l'époque où mon corps était vigoureux, avant qu'il me le prenne sans remords. Il me l'a brisé de son inconscience, de son insouciance, de sa bêtise.

Un soir, un verre de trop.

Tandis que je les entends se précipiter dans les escaliers pour venir se quérir de ce vacarme, je réussis à dissimuler la seringue sous le lit et à rabaisser la manche de mon chandail. Ils n'y verront que du feu, car ils ne veulent pas comprendre. Le fardeau que je suis devenu est si immense qu'ils ne savent même plus comment le gérer. Ils chuchotent quand ils croient que je suis endormie, de la manière de se débarrasser de moi, je les ai entendus pleurer, tandis que moi, je ne sais même plus avoir pitié. J'étais leurs fiertés, avant ce jour. J'étais quelqu'un, avant qu'on me prenne mon corps. J'étais une danseuse, mais le plus important, avant qu'on me dénature, j'étais une adolescente de quatorze ans.

C'était il y a un an.

C'était en juillet.